Bienvenue sur ce blog

Je reprends ce blog interrompu pendant deux années, avec le même projet de départ : présenter des manifestations que j’organise ou co-organise, donner accès à des textes,  à des liens avec des lieux, des personnes, des collectifs qui sont importants pour moi,  réagir à des   objets ou des manifestations  (films, livres, rencontres) qui m’inspirent ou me donnent envie de discuter.

Je suis professeur en sciences de l’information et de la communication, actuellement et mes recherches portent sur les publics des musées et des bibliothèques, sur les sciences en société, sur les pratiques de communication dans la recherche et particulièrement dans l’enquête, et sur les liens entre recherche académique, action culturelle, engagements militants.

Colloque Hubert Curien, Science & You , Nancy 3-6 juin 2015

Séminaire Confrontations de savoirs (2016-2017)

Séminaire de recherche « Confrontations de savoirs »

Proposé et animé par Igor Babou (université Paris Diderot, CERILAC) et Joëlle Le Marec (université Sorbonne Paris 4-Celsa, GRIPIC)

Séminaire commun au master recherche « Journalisme, culture et communication scientifiques » (Paris Diderot) et au magistère «Communication» (master 2) (CELSA Paris 4)

Le séminaire est ouvert au public (collègues et doctorants, professionnels, etc.) dans la limite des places disponibles.

Le lundi de 9h à 11h00, à Paris 7 (numéros de salle à venir) ou au Celsa (Salle R06). Les numéros des salles affichés sur place)

Télécharger le programme (pdf)

Dans l’espace public médiatique, ainsi que dans les institutions culturelles ou territoriales, de même que dans divers contextes de la vie sociale ordinaire, les savoirs sont l’objet de confrontations. L’idée de « confrontation » est ici à prendre dans un sens large, c’est à dire non seulement sous l’angle de la conflictualité (l’exemple des controverses étant le plus classique), mais également sous celui du débat d’idée, des contradictions entre cadres normatifs, des jeux d’acteurs, voire des collaborations entre personnes et groupes sociaux. Loin de s’imposer par leur rationalité, les savoirs nécessitent tout un appareillage social, discursif et matériel pour être simplement reconnus comme tels. Par ailleurs, les légitimités des détenteurs de savoirs sont engagées dans le cadre de pratiques et d’interactions. Dans ce séminaire, on examinera, sur des bases empiriques, des situations où des savoirs se confrontent : savoirs scientifiques, bien entendu, mais aussi savoirs journalistiques, savoirs des sciences humaines et sociales, des Lettres, savoirs d’expertise, savoirs locaux, savoirs pratiques, etc. Interroger les savoirs dans les interactions de la vie sociale ordinaire ou institutionnelle permet d’éviter toute réification de la notion de « savoir », et impose également de mettre à distance – autant que faire se peut – nos ethnocentrismes et autres « grands partages » fondateurs.

Contacts :
igor.babou@univ-paris-diderot.fr et jlemarec@neuf.fr
Paris Diderot : 5 rue Thomas Mann, Bâtiment C, 75013 Paris –
Celsa : 77 Rue de Villiers, 92200 Neuilly-sur-Seine

Modalités du contrôle des connaissances : 100% contrôle continu.

La participation orale aux débats du séminaire (prises de paroles spontanées, rigueur de l’argumentation, formulation des questions, etc.) sera évaluée. Pour les étudiants du parcours recherche du master de Paris Diderot, un document (de 5 à 10 pages) présentant la manière dont le thème et les séances du séminaire seront intégrées à la problématisation du mémoire fera également partie de la note.

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A propos du film : »Eau Argentée » (Ossama Mohammed, Simav, et 1001 Syriens)

579326.jpg-r_640_600-b_1_D6D6D6-f_jpg-q_x-xxyxxLe 12 décembre 2014, lors d’une séance de notre séminaire « Esthétique, média, oralité, image » à l’université Paris Diderot, nous écoutons Jean-François Ternay et Edouard Mills Affif nous parler des images qui circulent. Jean-François discute le cas des mages produites dans les hôpitaux et cabinets d’échographie qui migrent vers les blogs familiaux. Edouard parle des images produites et diffusées dans les réseaux par les anonymes témoins, acteurs, victimes ou bourreaux dans des conflits et crimes, images dites « brutes » relayées de page en page, visionnées en boucle sur des milliers de postes informatiques. Edouard ne nous montre aucune image, il nous livre ses propres questions en tant que documentariste.

la sémiotique a fait éclater l’idée que les images seraient des formes colorées inscrites ou projetées sur un support, qui pourraient donc se transmettre inchangées d’écran en écran. Ce sont des productions plus ou moins artisanales qui mobilisent des individus, des contextes, des objets, des technologies plus ou moins développées industriellement, des institutions, des sociabilités. De fait, Edouard ne nous invite pas à regarder des photos prises au téléphone portable dans des lieux de manifestations, tortures, exécutions, et trouvées sur les sites de partages de photos et vidéos. Il développe ses propres réflexions sur la circulation de ces images, et nous conseille d’aller voir, dans un cinéma, un film fabriqué à partir de matériaux qu’un autre cinéaste a collectés. J’ai donc été voir « Eau argentée » en salle au Reflet-Médicis, le 27 décembre.

Comment fait-on après avoir vu ce film ?

Commençons par reproduire les paroles du cinéaste Syrien Ossama Mohammed qui figurent sur le dossier de presse du site web des films Potemkine : « En Syrie, des youtubeurs filment et meurent tous les jours tandis que d’autres tuent et filment. A Paris, je ne peux que filmer le ciel et monter ces images youtube, guidé par cet amour indéfectible de la Syrie. De cette tension entre ma distance, mon pays et la révolution, est née une rencontre. Une jeune cinéaste kurde de Homs m’a ‘tchaté » : « si ta caméra était ici à Homs que filmerais-tu ? ». Le film est l’histoire de ce partage ».

La jeune « cinéaste » kurde mentionnée dans ce texte est Wiam Simav , co-réalisatrice sur l’affiche. Mais le terme « cinéaste » prête un peu à confusion car Simav (« eau argentée ») est en réalité une jeune femme qui a acheté une caméra et l’a transportée dans sa capuche à Homs, où elle habite, pour filmer quotidiennement ce qui s’y passait, dans son propre périmètre de vie et de mort.

La moitié du film est réalisé par Ossama Mohammed à partir d’un d’images glanées sur Youtube, au fil du conflit syrien, depuis les grandes manifestations pour exiger la chute du régime et la liberté, à partir de ce qui en a été saisi par des manifestants parfois épouvantés  (on entend crier « ils tirent à balles réelles ! ») jusqu’aux images atroces de répression, des morts, des corps sanglants, des adolescents nus torturés, le tout montré, monté et commenté, par un syrien qui voit avec nous et presque pour nous. Ossama a quitté la Syrie pour parler de ces images à Cannes en 2011 et il est resté en France car ses amis lui ont dit qu’il était désormais en danger en Syrie. Le cinéaste nous dit qu’il a perdu en France le courage de rentrer en Syrie, et qu’il espère être vraiment en danger, pour faire partie de son peuple. Il reçoit un soir d’hiver par facebook « comme un signe du destin » le message d’une jeune femme qui va bientôt lui transmettre pendant des mois sa voix et sa moisson d’images quotidiennes : l’effroi et ses lamentations après la fuite devant des soldats (« ils sont sur le palier ») la famille dispersée, l’école qu’elle a inventée dans les ruines, les enfants qui y arrivent très en avance tout joyeux, la promenade avec un de ses petits élèves, Omar, sur la tombe du père de l’enfant, les chats amputés et gémissants dans les ruines, les ruines, les ruines les ruines. Après l’attaque armée contre son foyer, Ossama conseille à Simav de quitter la Syrie et il nous dit – à nous, spectateurs – qu’il a envie qu’elle le rejoigne, pour sa sécurité bien sûr, mais aussi peut-être pour diminuer son héroïsme à elle et atténuer sa lâcheté à lui. Ces aveux si troublants sont aussi, sans doute, une main tendue au spectateur français, qui verra le film dans le confort d’une salle parisienne, saisi par le chagrin et l’impuissance, renvoyé à l’indignité de son indifférence et de son bien-être associés. Ossama est proche de Simav mais il est également proche de nous par ces aveux qui le mettent à la merci du jugement et nous soulagent quant à nous de la tentation de projeter un mépris qui lui est totalement étranger, ou du sentiment de notre propre insignifiance dont un philosophe catalan dont j’ai hélas oublié le nom a dit qu’il était une suprême aliénation ; Ossama est le médiateur, indispensable, qui nous permet, par contacts, d’être aussi avec lui avec elle, et avec eux, malgré l’incommensurabilité des conditions vécues, et de nous rapprocher, potentiellement seulement, de certains de ceux qui ont pu filmer et témoigner sans rien pouvoir partager d’autre, compte-tenu des conditions, qu’un mouvement de caméra affolé et un éclat de voix.

D’ailleurs, venue à Cannes en mai 2014, Simav se sent très loin de nous tous ici, elle décide de retourner en Syrie, à Homs. Même Ossama ne suffit pas. Elle dit à un moment, sans d’adresser à nous qui ne sommes pas dans son esprit, mais à lui : « la France est froide et lointaine comme une tombe sans nom ». Nous restons ici, témoins de l’héroïsme inaccessible de la jeune femme, mais avec Ossama qui est quelque part en France et nous a réservé une place dans ce qu’il fait à propos de son pays la Syrie.

Quittons le film un moment : l’espace social et médiatique est encombré d’entités discursives frénétiquement agitées en tous sens pour leur donner un semblant de vie à des fétiches théoriques (« acteurs économiques », « indicateurs », « forces en présence », « évolutions », etc.) et imposer l’apparence d’une réalité dite pragmatique de tendances et de faits mondiaux, dont nous ne connaissons aucune des médiations qui les construisent comme tels. L’ordinaire nous apparaît alors comme un registre esthétique et politique alternatif, sobre, mineur, poétique, aimable. Le quotidien devient, culturellement l’équivalent de l’intérêt que l’on porterait à des coutumes désuètes et inoffensives que notre attention honorerait et qui par contrecoup nous feraient bénéficier du prestige d’une sensibilité même fugace, sans que cela nous engage outre mesure dans les exigences d’un tel intérêt.

Des faits et des grandes tendances nous ne connaissons que la récurrence devenue routinière de chocs annoncés, et le flot des réactions qui les suivent, lesquelles obéissent invariablement à la règle d’une appropriation nécessairement distanciée ou  décalée – dans le cas qui nous occupe, rien de plus attendu, rien de plus vain au fond, que la célébration dans toute la critique du film de la force poétique de l’œuvre en dépit des images insoutenables qu’elle exploite.

Rien de plus destructeur aussi, ni de plus proche peut-être des frustrations qui rendent la violence acceptable et peut-être tentante, que la haine de soi et des autres cultivée à la faveur des constats répétés d’impuissance, et des dénonciations enflammées de l’inaction des individus ordinaires.

Il me semble, en tant que spectatrice, que ce film est, entièrement, une initiative vouée au partage : regarde, montre-moi, raconte-moi, sois mon témoin, permets-moi d’être témoin, soyons témoins de ceux qui sont témoins.

Je suis frappée par le fait que le cinéaste, inquiet, disponible, ait été si doublement attentif à des signaux fragiles venus de là-bas, et à la possibilité qu’ils aient un sens ici. Je suis frappée par l’effort fourni pour proposer cet agencement singulier qu’est le film, lui frayer un passage dans le fatras médiatique, sans postuler l’insignifiance lorsqu’il s’agit de rejoindre des spectateurs réellement attendus (puisqu’il est occupé pleinement à ce partage avec elle et avec nous). Ossam fait confiance au torrent de la vie ordinaire, dotée de sa pleine force politique et sensible, il fait ce qu’il faut là où il se trouve pour que ce torrent trouve sa place et son lit lorsqu’il le croise.  Nous ne le consommerons pas pour nous, nous ne nous demanderons pas comment faire plus, comment faire mieux, nous nous laisserons déranger par le passage de ce même torrent de la vie ordinaire qui vient de l’extraordinaire drame en Syrie, et nous nous pousserons ensemble, plus pour en désigner le passage que pour aménager un dispositif.

Le cinéaste préoccupé est attentif non seulement à la voix, l’image, l’histoire de Simav, mais à celles de tous les anonymes qui jettent des images filmées dans l’enfer, images envoyées par les victimes à quel prix, images envoyées par les bourreaux. Il les visionne par centaines, il les examine, tendu et fébrile, il nous fait revoir plusieurs fois l’image épouvantable d’un adolescent accroupi nu dans le coin d’une salle d’interrogatoire, lui-même a dû la scruter pendant des heures, y revenir sans cesse affolé, tremblant, interrogateur. Il la commente partiellement. A un autre moment, il nous fait partager un fragment de dialogue avec un jeune syrien qui lui demande des conseils pour la création d’un ciné-club et conseille ce qu’il fait lui-même : « tu peux commenter des films ».

La jeune femme quant à elle, filme pour Ossama et le dit également à plusieurs reprises. Ce n’est pas à un public anonyme ou fantasmé qu’elle pense mais au cinéaste, personnellement. Elle le lui dit, je ne me rappelle pas les termes exacts, que sans lui elle n’aurait pas pu, qu’il était son cordon ombilical. Elle s’adresse à lui son compatriote, son ami, « havalo », son témoin.

Quand elle se promène avec Omar, toutes les médiations de l’attention à autrui se déploient, et il se produit le miracle stupéfiant d’un monde commun, chaud, doux, prometteur, auquel des êtres vivants tous différents participent, en incluant les mémoires vivantes des proches disparu, et les présences animales, végétales : l’enfant parle à son père en lui offrant la compagnie des belles fleurs sur sa tombe. On le voit dans Homs totalement dévastée remarquer tout joyeux des grandes feuilles bien vertes qu’il veut cueillir pour les ramener à sa mère, « pourquoi ? » « Pour qu’elle puisse faire des feuilles farcies », « ce n’est pas avec ces feuilles là qu’on les fait » « ah bon ? », l’enfant écoute soudain car Simav enseigne. Un peu plus loin il s’exclame « oh la fleur ! » il court vers un coquelicot qui a frayé sa voie dans les ruines vers le soleil. « C’est comme la nuit sauf qu’il y a de la lumière » dit Omar qui est dans son royaume de vie, d’attention aux choses, de gaité, de dialogue, de découvertes, mais avec cette inquiétude et ces sensations de nuit en plein jour et de vigilance car les snipers l’inquiètent. Simav le suit, l’écoute, le corrige à propos des feuilles (elle prend ses responsabilités, elle leur a fait l’école dans les ruines), elle le regarde et le fait regarder de tout près à Ossama le cinéaste qui qui nous fait partager cette promenade sur un grand écran. Nous sommes tous ensemble à cet instant, Omar, Simav, les leurs, la mémoire du père, la maman cuisinière de feuilles farcies, le cinéaste témoin et magicien, et les spectateurs réunis dans la salle (six ce soir-là au Reflet Médicis). Omar, enfant intelligent, vif, rayonnant, beau comme les fleurs qui sont des formes de vie ses sœurs, mais fragiles comme elles et comme les chats martyrs. Il vit sous les bombes, en Syrie. Nous apprenons que son oncle l’a retiré de l’école car Simav ne porte pas le voile et parce qu’il est déjà soupçonné d’une tendance au blasphème. Or, il n’est pas beaucoup moins âgé que l’adolescent nu accroupi dans l’enfer de la salle d’interrogatoire, il n’est pas beaucoup moins âgé que les jeunes soldats hilares qui se filment en train de tourmenter leurs prisonniers. Il n’est pas en sécurité et nous ne savons pas ce qu’il deviendra. Le film lui est dédié. Une personne me disait récemment à propos de ce qui arrive à autrui, en citant Wittgenstein  « on n’a pas mal à la dent de l’autre ». Certes, mais je repense aux propos de Gabriel Salinas lors d’une très longue conversation il y a deux ans à propos des témoignages des bourreaux et victimes de la dictature chilienne.  J’ai pleinement réalisé à ce moment que Gabriel employait sa merveilleuse intelligence à faire trois choses qui, ensemble, ont forgé l’épaisseur de son quotidien : questionner et tenter de comprendre les phénomènes de la violence et du mal, assumer le principe inflexible du refus de la violence, et cultiver la compassion et la fraternité directe à l’égard des victimes de la violence et du mal. Ce que le film nous fait, c’est de dissiper les brumes des fausses pistes, et ouvrir des galeries dans l’épaisseur commune de nos vies ordinaires : celles d’Edouard, Simav, Ossama, Omar, Gabriel, et à travers eux, mille et une personnes dont ils se rendent témoins.

« La pierre triste » de Filippos Koutsaftis, 2000, (Ecrans Documentaires Cachan)

smallhttp://www.derives.tv/La-pierre-triste

Le cinéaste regarde pendant une douzaine d’années la ville d’Eleusis.
Sa gigantesque raffinerie en croissance continue, la cimenterie Titan, les routes, autoroutes, échangeurs, chantiers de démolition, de construction, les urbanisations, panneaux publicitaires géants remplis des visages de mannequins, tout cela pousse la ville habitée et son sous-sol truffé de vestiges, qui livre sans arrêt des tombes, des temples, des traces (puits) de l’ancienne Eleusis des batailles héroïques, celle des Mystères auxquels Hadrien fut initié, celle d’Eschyle, celle du cycle annuel de Perséphone qui va rejoindre Pluton aux enfers et en revient chaque année avec le printemps, celle du culte des mi-semailles et de Marie, ou de Saint Nicolas protecteurs des ouvriers de la cimenterie dont seul 10 ont survécu aux maladies des poumons. Peu à peu, le cinéaste suit dans ce chaos de destructions, de publicité et de laideur industrielle et de crise destructrice (ambition, indifférence, insensibilité) des figures fragiles, des habitants ordinaires, beaucoup, parmi les plus vieux, réfugiés de la Grèce d’Asie Mineurs ( les « ioniens ». Il s’émeut de la sublime beauté des gestes ordinaire, du soin aux multiples mémoires, celle des êtres chers disparus, celle de la rencontre terrible avec l’Histoire et les guerre, celle de la Grèce millénaire, es gestes et du soin portés aux traces si maltraitées par les obscures et absentes puissances des enfers industriels. Payanatos, comme un héros Tarkovskien ***  (le fou dans la piscine, s’il réussissait à la traverser sans que s’éteigne la bougie qu’il transporte le monde serait sauvé), ou comme celui des oiseaux deTarjei Vesaas, * inlassable vagabond des vestiges qu’il retrouve et  soigne, la tête couverte d’une, veste en loque « qui cache son auréole », le laitier qui disparaît, hélàs, les femmes qui allument les lampes, parcourent le site avec familiarité et modestie pour se rendre au culte, l’archéologue qui nettoie amoureusement un minuscule tesson où apparaît le délicat profil d’une jeune fille qui lui ressemble tandis que les pelleteuses arrachent les murs quelque part dans la ville, l’adolescent qui aide aux fouilles et qui ressemble tant, quant à lui, à Antinoüs, les vieux et vieilles aux visages timides et clairs dont le cinéaste célèbre la noblesse et la beauté et dont il écoute les paroles, rares, déchirantes, qui se répercutent en échos cosmiques sur l’ensemble du site et de la Grèce, le gardien du site qui connaît les passages des oiseaux, du lièvre, des couleuvres entre les colonnes tronquées et l’herbe rase. Les habitants sont modestes mais moins anonymes pour le cinéaste puis pour nous  que les puissants pétroliers et investisseurs dont on ne saura rien. Leurs gestes soigneux et infimes « rétablissent l’équilibre du monde », exactement comme le décrit David Abram dans « comment la terre s ‘est tue ».  Antonia est fière d’habiter près des tombes des sept Thébains qui ont tenu tête aux Spartiates, sa fierté à elle, femme toute simple, rachète l’indifférence absolue de toutes les puissances financières, politiques, tout ce qui a contribué à détruire totalement le cimetière où reposaient les sept thébains.
Le cinéaste au fil des années, découvre les lucioles, partout, celles dont parle Didi Huberman qui a justement commenté ce film ; des lucioles. C’est le film de l’attention portée aux autres, de la quotidienneté héroïque d’un peuple plein de héros, et dont le trésor politique, extraordinaire, réside dans la « décence ordinaire » de cette attention transmise, inlassable. Un merveilleux film, qui rétabli l’équilibre du monde.

Interview pour Knowtexblog

J’ai répondu à Florent Lacaille-Albiges pour knowtexblog, il me demandait quel lien je faisais entre la culture scientifique et la politique, j’ai répondu en essayant de retracer comment ce lien m’était apparu dans ma propre trajectoire, à mon échelle.

 

Direction de la collection « Etudes de Sciences » aux Editions des Archives Contemporaines

La  collection Études de Sciences a été créée pendant la période durant laquelle je pilotais  le cluster de recherche « Enjeux et représentations des sciences, des technologies et de leurs usages » (entre 2007 et 2011).

Je dirige désormais cette collection qui se développe bien au-delà des activités du cluster.

Elle reprend une des thématiques privilégiées par les Éditions des Archives Contemporaines (histoire et philosophie des sciences) en lui apportant des dimensions nouvelles, grâce à un dialogue soutenu avec l’éditeur qui développe une réflexion originale sur l’édition scientifique.

Il s’agit de créer un espace de rapprochements et confrontations  entre les approches et les objets  qui constituent classiquement le socle des recherches menées sur les sciences de la nature, et les travaux contemporains sur la production,  la transformation, la circulation des savoirs scientifiques, ceux-ci incluant résolument les sciences sociales.

Les ouvrages peuvent porter sur des thèmes  comme les spécificités culturelles des pratiques de recherche dans le monde, les pratiques de communication liées aux savoirs, la réflexion critique sur les sciences et les politiques scientifiques, l’exploration de pratiques  et d’objets nouveaux ou nouvellement perçus.

Les ouvrages publiés rendent compte de recherches récentes, vivantes, si possible collectives, contre une tendance générale, dans le milieu éditorial, à privilégier des ouvrages de synthèses pour le grand public.

Les ouvrages sortis en 2011-2012 sont :

  • Pascal Robert : L’impensé informatique
  • Bernard Miège et Dominique Vinck (dirs.) : Les masques de la convergence- Enquêtes sur sciences, industries et aménagements
  • Alain-Marc Rieu (dir.)  : Chinese and French views on Knowledge and Society today- Philosophy, Ethics, Epistemology
  • Hugues Chabot et Sophie Roux (dirs.) : la mathématisation comme problème
  • Marianne Chouteau et Céline N Guyen (dirs.): Mises en récit de la technique

Voir la collection »ETUDE DE SCIENCES ET HISTOIRE DES TECHNIQUES » sur le site des EAC  à cette adresse : http://www.archivescontemporaines.com/

Merci d’envoyer vos propositions de manuscrits à :  jlemarec@neuf.fr

 

 

 

Colloque International « La presse alternative, entre la culture d’émancipation et les chemins de l’utopie » (Lyon, 19, 20, 21 janvier 2012)

Programme

Jeudi 19 Janvier : Archives Municipales de Lyon

La conservation des fonds: entre pratiques alternatives et institutionnelles
9 :30 Ouverture : Anne-Catherine Marin, Mimmo Pucciarelli : Un pont en papier.
10 :00 Michel Chomarat : La presse marginale dans les bibliothèques publiques.
10 :20 Marie Bourgoin : La fanzinothèque.
10 :40 Débat
11 :00 Isabelle Rivé : Presse clandestine et milieux résistants à Lyon pendant la deuxième guerre.
11 :20 Franck Veyron : Pratiques originales de collecte et de conservation à la
Bibliothèque de documentation internationale contemporaine.
11 :40 Marianne Enckell : Un demi-siècle de conserv@tion anarchiste.
12 :00 Débat
12 :30 Repas
Source historiques, modèles et frontières de la presse alternative
14 :00 Alan Marshall : La technique et la communication… prolongement de la Révolution française.
14 :20 Roger Bautier : Les implications d’une presse d’opinion : la formation et l’expression de l’opinion.
14 :40 Benjamin Ferron : La production des idéologies dominées : l’exemple des médias des mouvements sociaux contre la mondialisation néolibérale.
15 :00 Débat
15 :30 Benoît Bruant : La presse satirique, tradition et réinvention d’un modèle populaire de contestation.
15 :50 Patrice Bouveret : La presse alternative : entre contre-information, contestation et expertise
16 :10 Débat

Vendredi 20 Janvier : Archives Municipales de Lyon

Pluralité des causes, singularité des engagements
10 :00 Antoine Fernandès : Pour un revue de la presse alternative et indépendante.
10 :20 Anne Jacquemot : Revendiquer la reconnaissance des médecines alternatives : une histoire dans la presse d’information en santé.
10:40 Laurent Martin : La bande dessinée underground américaine des années 1960-1970.
11 :00 Débat
11 :20 Antoine Idier : La presse alternative homosexuelle à Lyon dans les années 1970.
11:40 Bérengère Kolly : La femme libre et les soeurs saint-simonienne ; la formulation d’une utopie féministe et sororale dans et par la presse.
12 :00 Débat
12 :30 Repas
14 :00 Foued Nasri : L’expérience de Cosmopolis (1982-1984) ou l’histoire des déplacements des réseaux militants lyonnais au tournant des années 1980.
14 :20 Laurence Corroy : La presse lycéenne : un espace public repensé entre désir d’action émancipatoire et négociation nécessaire.
14 :40 Débat
15:10 Xavier Riondet : Subjectivisations politiques dans la revue Les cahiers pédagogiques entre 1963 – 1989.
15 :30 Pierre Sommermeyer : Itinéraire d’un militant, de la ronéo chinoise au web2.
16 :00 Débat

Samedi 21 Janvier : Mairie du Premier Arrondissement (à confirmer)

Médias alternatifs dans le monde
10 :00 Jean-Michel Rampon : Un registre multidimensionnel : médias alternatifs anglo-saxons et présentations de soi collectives sur internet.
10 :20 Edgar C. Mbanza : Mutations de la communication sociale en Afrique : les médias alternatifs «formels» en question.
10:40 Raffaello Ares Doro : La presse alternative dans l’Italie des années soixante-dix. Le cas du quotidien Lotta Continua.
11 :00 Débat
11 :30 Andrea Lanza : La presse de « l’autonomia creativa » entre ancienne révolution et utopie nouvelle (Italie 1975 – 1979).
11:50 Lou Marin : 40 ans de Graswurzelrevolution (1972 – 2012), publication de l’anarchisme non-violent en langue allemande.
12 :10 Débat
12 :30 Repas
Pratiques, espaces, objets
14 :00 Joëlle Le Marec : La presse alternative : sciences et société.
14 :20 Pierre Valentin : Le journal Actuel, ses lecteurs et le mouvement contre-culturel français, 1965-1975.
14 :40 Thierry Lefebvre : Interférences (1975 – 1981).
15 :00 Débat
15 :30 Flavie Holzinger : Le Monde Diplomatique, un modèle « grand public » de presse alternative.
15:50 Manus McGrogan : Explosif, écléctique, éphémères : Tout ! Au carrefour des radicalismes 1970-1971.
16:10 Vincent Chambarlhac : Se retourner sur un imaginaire défait, les Révoltes Logiques.
16 :30 Dominique Mureau : Si votre journal ne vous plait plus, faîtes le vous-même!
17 :00 Débat

 

Joëlle Le Marec et Igor Babou quittent l’ENS de Lyon et le C2So

A partir du 1er septembre 2011, nous aurons quitté à la fois l’ENS de Lyon et le C2So pour prendre respectivement un poste de professeur à l’Université Paris 7 (pour Joëlle Le Marec) et un poste de professeur à l’Université de La Réunion (pour Igor Babou).

Après avoir passé 16 ans à l’ENS (pour Igor) et 11 ans (pour Joëlle), de nouveaux projets s’ouvrent en effet à nous. Nous avons pris énormément de plaisir durant toutes ces années à créer une équipe de recherche et à structurer des enseignements, dans le cadre d’un projet que nous avions amené en arrivant à l’ENS Lettres et Sciences humaines en 2000 : l’Action Concertée Incitative « Sciences, médias et société ». Ces ACI « Jeunes chercheurs » avaient été proposées par le ministère de la recherche pour aboutir précisément à la création d’équipes de recherches sur des projets novateurs, à la fois scientifiques et politiques. Scientifiques et politiques puisque nous nous inscrivions à l’époque dans une conception de la recherche qui, malheureusement, n’a plus été portée avec l’actuel gouvernement : il s’agissait de revendiquer des équipes de petite taille, concentrées sur des objectifs de recherche au long cours, privilégiant le questionnement, la critique et l’autonomie, l’obtention de résultats publiés d’où émergeraient de nouveaux questionnements.

Avec le dogme de « l’excellence », la succession permanente des projets opportunistes pour survivre et l’énergie passée dans les regroupements (d’équipes, de réseaux, de moyens, etc.), il devenait difficile de maintenir la vision initiale. Lors de la création et du développement de l’équipe et des mastères, nous avons bénéficié du soutien et de la confiance de collègues, de doctorants, de personnels administratifs et techniques, et de nombreux acteurs culturels et associatifs avec qui nous avons parcouru beaucoup de chemin. Nous les remercions très vivement, nous savons qu’ils éprouvent les mêmes difficultés et partagent les mêmes espoirs de développement d’une créativité qui trouvera toujours son expression en dépit de la standardisation et de la bureaucratisation de nos métiers contre lesquelles nous luttons tous en permanence.

Nous sommes heureux de rejoindre le Laboratoire « Langues, Textes et Communication dans les espaces Créolophones et Francophones (LCF – UMR 8143) » à l’université de La Réunion (dans le cas d’Igor) et le « Centre D’Etude et de Recherche Interdisciplinaire de L’UFR Lettres, Arts et Cinéma (CERILAC – EA 4410) » à l’université Paris 7 (dans le cas de Joëlle).

Pour suivre nos nouvelles pérégrinations, prolonger les discussions en cours, prendre contact, etc., rendez-vous sur nos blogs :

http://igorbabou.fr et http://joellelemarec.fr

ou encore : http://indiscipline.fr et http://science-societe.fr

A bientôt !

Ouvrages et monographies

2016 : Bernard Schiele, Joëlle Le Marec, Patrick Baranger (eds.) Science Communication TodayCurrent strategies and means of action, Presses Universitaires de Nancy

2015 : Joëlle Le Marec, Ewa Maczek (sous la direction), Musées et Recherche – Expérimenter et coopérer : dialogues sur le sens de l’innovation, Dijon : OCIM

2013 : Joëlle Le Marec, Mimmo Pucciarelli (sous la direction de), La presse alternative : entre la culture l’émancipation et les chemins de l’utopie, Lyon, Atelier de création libertaire

2012 : Joëlle Le Marec, Ewa Maczek, Serge Lochot (sous la direction de), Musées et recherche : cultiver les alliances. Dijon : OCIM

musees

 

 

 

2010 : Joëlle Le Marec, Les études de sciences : pour une réflexivité institutionnelle (dir.).  Paris : éditions des archives contemporaines

 

2007 : Joëlle Le Marec, Publics et musées, la confiance éprouvée, Paris : L’Harmattan.

2005 : Le Marec, Joëlle et Babou, Igor (sous la dir. de), « Sciences, médias et société« , Lyon : ENS LSh/Laboratoire « Communication, Culture et Société – Actes du colloque à l’ENS LSh, 15-17 juin 2004 » (publication électronique)

2003 : Emmanuel Souchier, Yves Jeanneret et Joëlle Le Marec [sous la dir.de], Lire, écrire, récrire – objets, signes et pratiques des médias informatisés, Paris : Editions de la BPI/Centre Pompidou.

2002 : « Ce que le « terrain » fait aux concepts : Vers une théorie des composites » – Habilitation à diriger des recherches, Paris : Université Paris 7

2000 : Jean Davallon, Hana Gottesdiener, Joëlle Le Marec,  Premiers usages des cédéroms de musées Dijon : éditions de l’OCIM

1999 : Danièle Brochu, Jean Davallon, Claude Camirand, Hana Gottesdiener,Joëlle Le Marec, Andrée Lemieux, Marie-Sylvie Poli, Katy Tari, Les musées face à l’édition multimédia Dijon : éditions de l’OCIM

1998 : Sophie Deshayes, Joëlle Le Marec, Serge Pouts-Lajus, Sophie Tiévant  Observation et analyse d’usages des réseaux Atelier Culture et Autoroute de l’Information. Paris : Ministère de la Culture et de la Communication.

1996 : Bernadette Goldstein, Joëlle Le Marec, Serge Pouts-Lajus, Roland Topalian. Interactifs : fonctions et usages dans les musées Paris : Direction des Musées de France

1989 : Dialogue ou labyrinthe : la consultation du catalogue informatisé par les usagers, Paris : éditions du Centre Georges Pompidou.

 

2000 : Jean Davallon, Hana Gottesdiener, Joëlle Le Marec.Premiers usages des cédéroms de musées Dijon : éditions de l’OCIM

1999 : Danièle Brochu, Jean Davallon, Claude Camirand, Hana Gottesdiener,Joëlle Le Marec, Andrée Lemieux, Marie-Sylvie Poli, Katy Tari, Les musées face à l’édition multimédia Dijon : éditions de l’OCIM

1998 : Sophie Deshayes, Joëlle Le Marec, Serge Pouts-Lajus, Sophie Tiévant Observation et analyse d’usages des réseaux Atelier Culture et Autoroute de l’Information. Paris : Ministère de la Culture et de la Communication.

1996 : Bernadette Goldstein, Joëlle Le Marec, Serge Pouts-Lajus, Roland Topalian. Interactifs : fonctions et usages dans les musées Paris : Direction des Musées de France

1996 : Le visiteur en représentations : l’enjeu des évaluations préalables en muséologie – thèse de doctorat en sciences de l’information et de la communication (soutenue le 29 janvier 1996), Saint-Etienne : Université Jean Monnet. [Jury : Paul CARO (Président), Daniel JACOBI (Rapporteur), Jacques PERRIAULT (Rapporteur), Jean DAVALLON (Directeur), Pierre MOEGLIN, Bernard SCHIELE – Mention Très Honorable avec les félicitations du jury à l’unanimité]

 


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